[Critique] The Revenant ou l'imploration de Leo pour l'Oscar
Après 6 nominations aux Oscars dont 3 pour la catégorie "Meilleur Acteur", Leonardo DiCaprio a enfin reçu la statuette tant convoitée pour son rôle de trappeur assoiffé de vengeance dans "The Revenant".
L'occasion pour nous de parler du film mais surtout de ce rêve, enfin réalisé, pour Leo.
C'était devenu un des sujets d'amusement préférés d'Internet : l'incapacité de Leo à gagner un Oscar. Le monde entier en a parlé, s'est gentiment moqué tout en le soutenant. Le sujet était si important que les médias ont plus parlé de cela pendant la promo de The Revenant que du film en lui-même.
Et c'est cela le problème fondamental du film : il n'est qu'un prétexte. Tout ce que les gens voulaient savoir, c'est si il allait permettre à Leo de gagner ou pas l'Oscar.
Un film pensé pour les Oscars
The Revenant est l'archétype du film pensé pour ramasser des statuettes et permettre à Leo de décrocher le titre tant convoité :
- Un réalisateur (Alejandro González Iñárritu) brillant, à l'origine de Birdman (Oscar du meilleur film 2014), Babel ou encore 21 Grammes.
- Des acteurs en vogue : Leo, Tom Hardy, Domhnall Gleeson.
- Un film "écolo" basé sur une expérience onirique et brutale dans des paysages éblouissants. Toute la force et la magnificence de la nature transparaissent dans le film. Ici l'homme n'est pas le maître, il ne dompte pas son environnement mais le subit, et il est en permanence en danger. Le discours très écolo de Leo lors de la cérémonie vient d'ailleurs appuyer cette position
- Un fond historique sur l'histoire américaine et surtout cette période de conflit entre Colons et Idiens, sujet encore très sensible et polémique aujourd'hui aux USA. Ici les Indiens sont loin des stéréotypes habituels que l'on peut voir dans les films sur cette époque. Ils ont un but noble (sauver une des leurs) là où les "hommes blancs" cherchent le profit. Un bon moyen pour certains partistans du film de "s'excuser" pour les actes de leurs ancêtres.
Par ailleurs, les scènes d'action sont très impressionnantes et superbement réalisées. Le film est de manière général très silencieux, ce qui casse avec les images, parfois très violentes, affichées à l'écran.
Une imploration de 2h36
Si tout est très beau, magnifiquement mis en scène, avec plusieurs niveaux de lectures et une richesse certaine, rien n'y fait... Pendant 2h36, on occulte tout le film pour ne voir que Leo, implorant l'Académie de lui donner un Oscar et faisant tout pour convaincre les spectateurs qu'il le mérite amplement.
De la préparation de son rôle à l'incarnation de son personnage dans le film, tout est prétexte à la performance extrême, ce qui donne une désagréable impression de surrenchère. McConaughey a perdu 20 kilos pour Dallas Buyers Club, Eddie Redmayne a "reconfiguré son corps" avec un chorégraphe pour incarner Stephen Hawking, et Leo ne coupe pas à la règle du "performance physique extrême = oscar".
Ainsi l'ami Leo a appris à parler indien, a dormi dans une carcasse d'animal, a mangé du bison cru, a souffert d'hypothermie...
Son personnage est probablement le mec le plus malchanceux du monde : il se fait défoncer par un ours, est laissé pour mort, il a perdu sa femme, son fils se fait assassiner sous ses yeux, il est poursuivi par des indiens, il tombe d'une falaise... Bref à la fin c'est n'importe quoi et on attend à tout moment qu'il glisse sur une plaque de verglas et se casse le cou tellement la malchance est de son côté.
Mais le plus intéressant est qu'après avoir survécu à ses blessures, il rampe un long moment pour se déplacer, ses jambes n'étant pas encore dans un superbe état. La symbolique est forte. Leo se met à terre et rampe littéralement aux pieds des spectateurs et de l'Académie, en hurlant, comme s'il implorait désespérément le monde entier de lui donner son Oscar.
Cette longue quête de vengeance à travers une Amérique sauvage et dangereuse s'apparente donc plus à une accumulation d'épreuves, que Leo affronte dans la douleur, cherchant ainsi à prouver qu'il est le seul à mériter l'Oscar cette année, et qu'il a tout fait pour l'obtenir.
Comme le personnage qu'il interpréte, Leo a survécu à tout, n'a plus rien à prouver, a tout enduré pour atteindre son objectif. Et c'est cela que l'on retient vraiment de The Revenant.
Conclusion
Pour le film, ce n'est clairement pas la claque annoncée, malgré ses énormes qualités et son duo Leo DiCaprio/Tom Hardy au top. Vite vu, vite oublié.
Iñárritu s'est contenté de transformer la statuette en soif de vengeance, Hollywood en Amérique sauvage et impitoyable (le parralèle est cocasse, il faut l'avouer), et a finalement romancé le désir fulgurant de Leo d'avoir sa récompense. Et quoi de mieux pour faire cela qu'une longue plainte de 2h36 poussant les acteurs à la performance extrême, utilisant tous les codes des "films à Oscar" ?
Note finale : 7/10
Pour ce qui est de Leo, je suis partagé. Evidemment ravi qu'il ait enfin réussi à avoir son Oscar, amplement mérité vu son talent pour interpréter des personnages très différents. Mais un peu triste que cela se fasse dans ces conditions. Il reste un certain goût amer après la cérémonie... Comme si la pression populaire et les supplications de Leo avaient réussis à faire plier l'Académie.
Maintenant que la vague est passée, je sais que Leo aura une nouvelle chance de montrer au monde l'étendu de son talent, et je souhaite sincèrement que l'Académie le récompense pour cela.
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